Politique

Ni Macron, ni Le Pen

Une dizaine de mois après avoir promis de ne plus voter PS, même pour “faire barrage” à la droite ou à l’extrême droite, un collectif de citoyens engagés à gauche milite sur les réseaux sociaux pour l’abstention le 7 mai 2017. Nous publions ici leur tribune.

Citoyens et citoyennes issus de la gauche, la plupart d’entre nous avaient par défaut “fait barrage” en 2002, en 2007 ou en 2012, ou alors s’étaient tus sur leur choix de ne pas mettre un bulletin contraire à leur conviction. Pourtant cette fois, nous avons collectivement décidé de ne plus céder aux injonctions et de le revendiquer haut et fort. Certains d’entre nous n’iront pas voter, afin de viser le chiffre symbolique de 51% d’abstention. D’autres iront mettre un bulletin blanc ou nul dans l’urne, afin de signifier leur rejet des deux alternatives pourries. Mais dans tous les cas, nous ferons du bruit le 7 mai autour des mots d’ordre #SansMoiLe7Mai et #Dégagez, afin de dé-légitimer le processus électoral et d’instaurer un rapport de forces dans la rue, en entamant un troisième tour social.

Nous n’oublierons pas la loi Travail

Si encore il s’agissait de voter pour un président qui nous garantirait de ne pas empirer la situation actuelle déjà catastrophique, ou qui s’engagerait simplement à ne plus nous tirer dessus lorsque nous manifestons pacifiquement. Mais ce n’est même pas le cas ! Nous avons vu au contraire que dès qu’ils étaient au pouvoir, les politiciens qui prétendaient “faire barrage à la droite et l’extrême-droite” menaient des politiques comparables, voire pires à celles qu’ils dénonçaient dans l’opposition : explosion des inégalités, casse des services publics, abandon des zones péri-urbaines et des banlieues, mise en concurrence des salariés… Nous les avons vus appliquer toutes les mesures de casse sociale préconisées par l’Union européenne, poursuivre le saccage de la nature, et instaurer des politiques liberticides afin de réprimer nos manifestations, sous couvert de lutte contre le terrorisme.

Nous n’oublierons jamais la violence de la répression du mouvement contre la loi Travail, durant laquelle beaucoup d’entre nous ont fait, à l’appel de François Ruffin, le serment de « ne plus jamais voter PS ». Il est inconcevable pour nous de voter pour Macron, ministre de l’Économie de François Hollande et soutenu par ce dernier.

« Il fallait en effet impérativement un candidat du vide, un candidat qui ne dise rien car ce qu’il y aurait à dire vraiment serait d’une obscénité imprésentable : les riches veulent rester riches et les puissants puissants. C’est le seul projet de cette classe et c’est la seule raison d’être de son Macron » Frédéric Lordon

Nous ne céderons plus au chantage médiatique

En fait, nous ne supportons tout simplement plus aucune injonction à nous dicter notre vote, à nous faire agir contre notre intime conviction et contre nos intérêts de classe. Nous ne supportons plus cette petite élite intellectuelle, la morgue d’un Stéphane Guillon ou d’un Bernard Henri-Lévy, qui nous abreuvent de leurs raisonnements hypocrites afin de nous faire légitimer l’accession au pouvoir d’Emmanuel Macron.

Nous ne nous sentons donc nullement concernés par les initiatives anti-FN orchestrées par des associations affidées au PS (UEJF, SOS Racisme, Ni Putes Ni Soumises, entre autres) qui, depuis des décennies, ont développé un discours moralisateur contre le FN sans jamais une seule fois s’attaquer aux causes structurelles du racisme et des inégalités qu’ils prétendent combattre. Le ridicule de ces initiatives saute d’ailleurs suffisamment aux yeux pour qu’il soit nécessaire de s’y attarder.

On nous caricature comme étant incapables de faire la distinction entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, et tirant un trait d’égalité entre les deux. Nous estimons simplement que Macron est l’incarnation du libéralisme économique qui est une des principales causes de la montée du FN ces dernières décennies. Dans les urnes, le Front national a précisément émergé au moment où le PS au pouvoir a fait le choix funeste du tournant de la rigueur, et d’abandonner toute politique sociale en se soumettant totalement au cadre libéral de l’Union européenne.

Mais il y a pire : en remplacement de son projet social, le PS au pouvoir a développé une posture moralisatrice affirmant s’opposer au “racisme” et au “repli nationaliste” du Front national, pour au final nous imposer un Manuel Valls dont certaines positions sont exactement les mêmes que celles de la droite et l’extrême-droite. Le FN est ainsi devenu l’épouvantail commode de la “gauche” au pouvoir pour ne jamais se remettre en question et continuer à alimenter l’incendie qu’elle prétendait vouloir éteindre.

Le seul moyen de lutter efficacement contre le FN est de sortir de ce piège mortel cause-conséquence en participant à un projet alternatif, que ce soit dans les rues ou dans les urnes. C’est la raison pour laquelle la plupart d’entre nous, quelles que soient les réserves qu’ils pouvaient avoir à son égard, se sont engagés pleinement derrière la candidature de Jean-Luc Mélenchon et saluent aujourd’hui son choix de ne donner aucune consigne de vote.

Derrière le “Front républicain”, la trahison d’une partie de la “gauche”

Le choix salutaire fait par Jean-Luc Mélenchon contraste fortement avec celui d’une grande partie de la gauche qui s’est ralliée à Macron dès les premières heures, comme par exemple Pierre Laurent qui a suivi avec quelque retard son prédécesseur Robert Hue.

En réalité, derrière le soi-disant “Front républicain” pour Macron se cache un des secrets les mieux gardés de la “gauche” : beaucoup de ses dirigeants, y compris ceux qui se proclament être “la vraie gauche”, agissent à l’exact opposé de leurs programmes. À les entendre, il semblerait même que l’acte constitutif de ce qu’ils appellent “être de gauche” serait précisément le fait d’aller dans les urnes “faire barrage à la droite et l’extrême droite” en votant pour un Emmanuel Macron. C’est-à-dire faire exactement le contraire de ce que nous croyions “être de gauche”, à savoir agir concrètement pour le progrès social, l’écologie, l’égalité des droits ou les libertés individuelles. Comment faire confiance à ceux qui nous appellent à voter pour ceux qui nous tirent dessus ? A fortiori lorsque ce vote Macron s’accompagne dans la bouche d’un Pierre Laurent d’un appel à des alliances électorales avec le Parti socialiste aux législatives. Cet appel a-t-il d’ailleurs été ratifié par les militants communistes ? Nous savons bien que non, car ils ne l’auraient jamais accepté.

La coupure entre la base et les directions des forces de gauche appelant au “Front républicain” n’a jamais été aussi vive. Ce vote Macron n’est finalement que la conséquence logique du choix de sacrifier des pans entiers de leurs programmes respectifs au profit d’accords électoraux avec le PS. Constituant une véritable machine de guerre contre les peuples comme on a pu le voir en Grèce, la trahison la plus emblématique est le ralliement aux traités de l’Union européenne.

« Vous dites vouloir voter contre la haine de l’autre, mais le projet de société de Macron repose tout autant sur la haine, le mépris et la diabolisation que celui de Marine Le Pen : la principale différence c’est que l’avilissement se focalise moins sur la couleur de peau que sur le statut social. » Charlie Foxtrot

Dé-légitimer l’élection pour entamer un véritable mouvement social

La vote Macron, selon Libé

Mais au final, peu importe les atermoiements d’une partie des directions politiques et syndicales. Le fait que l’immense majorité des militants refuse cette fois d’obéir aux consignes suffit. Et la clarification politique issue de ce grand dévoilement sera suffisante pour permettre l’éclosion d’une nouvelle génération politique, résolument indépendante et prête à renverser un système à bout de souffle.

En refusant de voter Macron, et en le disant ouvertement, nous créons les conditions d’un mouvement social puissant face à un président faible et choisi par défaut. Ce faisant, nous posons ainsi un véritable jalon pour l’avenir, nous créons une véritable alternative politique qui fera date dans l’histoire.

Les initiateurs de la campagne Dégagez  Sans nous le 7 mai

Nos Desserts :

Catégories :Politique

15 réponses »

  1. Si l’on est conséquent, on ne peut prendre que ce choix du « ni-ni » qui est le seul vrai choix. Le système met en branle toute la puissance de sa propagande pour persuader que « qui ne vote pas Macron est un facho ». Dans son indécence, l’oligarchie exige de nous d’élire avec enthousiasme notre bourreau, en nous promettant l’apocalypse hitlerienne si nous refusont ce geste suicidaire.
    Pourtant, si l’histoire du XXème siècle ne suffisait, les années qui nous séparent d’avril 2002 devraient ouvrir les yeux du « social-démocrate » le plus endurci : le libéralisme pave littéralement la voix du nationalisme, et au vu des désastres écologiques et sociaux qu’il a fait naître partout, on est tenté de dire que c’est le cadet de ses défauts.
    Un peu de lucidité : détournons-nous résolument de cette mascarade. La démocratie est morte le 23 avril, à nous de la faire renaître dans les rues et aux législatives.

      • Penses tu que les conditions de la campagne médiatique s’inscrive dans le respect des règles démocratiques . Que fais tu le la liberté d’information quand l’essentiel des médias, entre les mains du grand capital, s’est investi largement (au mépris des règles d’égalité) au profit du candidat Marketing à leur service ?

  2. La democratie , pour peu qu’elle ait jamais existée est morte lors du referendum sur la constitution europeenne ! nous vivons dans un etat de non droit , recusons toutes « autorité » !

    • Puisque Hollande s’est ABSTENU à Versailles… s’abstenir n’est pas un scandale… Hein?

      Puisque Hollande n’a pas voulu trancher en faveur des français… (de la VOLONTÉ des français exprimée lors de la plus HAUTE EXPRESSION de notre démocratie…) nous pourrions TRANCHER en faveur de français, et conquérir la liberté ! La liberté de nous débarrasser de ces deux « fatalités » bien organisées ?

      Pourquoi serions-nous obligés à participer à la mise en scène de leurs légitimités?
      Le 7 mai nous les demandons les comptes, si leurs chiffres sont inférieures à 60% des inscrits alors ils sont illégitimes

      il faudra réaliser des nouvelles élections cars la France ne peut pas être gouverné par un illégitime

  3. Voyons si Macron arrive mobiliser 60% d’inscrits si non il sera illégitime et la même chose pour l’autre alors nouvelle élection
    NOUS ne sont pas OBLIGES de participer et donner légitimité à des individus que portent de projets contraires à nos désirs, contraires à nos intérêts.
    Voyons si Macron arrive mobiliser 60% des inscrits : si non il sera illégitime et la même chose pour l’autre alors nouvelle élection
    Nous ne sommes pas OBLIGES de « collaborer » à leur donner une légitimité
    Si Macron n’arrive pas à mobiliser 60% des électeurs inscrits c’est qu’il est illégitime, qu’il ne peut pas nous gouverner, pour l’autre pareil!

  4. Et à ce nouvelle élection ni Macron ni Le Pen seront autorisés à se présenter puisque leur compte leur aura été faite
    Voulez vous -concitoyens- vouez-vous oui ou non faire vivre la DÉMOCRATIE?
    l’État c’est NOUS: nous feront la loi: pas la violence raciste de Le Pen ni la violence Financière qui porte Macron

  5. Bonsoir,
    J’ai 67 ans. En 2002 j’ai voté CHIRAC en me pinçant le nez.
    Dimanche soir et pendant toute la journée de Lundi, je me suis dit que je ne me ferais pas avoir une deuxième fois. De plus j’ai peiné à accepter et à comprendre la non consigne de vote de MELENCHON pour qui j’ai voté et milité.
    Puis j’ai réfléchi et je me suis dit que je ne me ferais pas avoir par MACRON comme par CHIRAC en 2002 parce que cette fois ci je sais, nous savons qu’il n’y a rien à attendre de sa part en retour d’un vote « republicain » et que je sais que quelque soit l’élu(e) nous ne devrons pas attendre 5 ans la prochaine présidentielle pour en espérer la solution de nos problèmes mais qu’il nous faudra tous convaincre un maximum de gens de sortir de la position de spectateurs-consommateurs des offres politiques des partis pour se bagarrer tous ensemble dans les urnes, dans les entreprises, dans les quartiers.
    Se torturer avec ce choix cornélien du vote au second tour c’est en fait sur valoriser l’importance du vote et mal placer son amour propre.
    Ce n’est pas tant en votant blanc ou nul ou en s’abstenant qu’on contestera efficacement la légitimité de MACRON, c’est en combattant sa politique au quotidien dans tous les compartiments de notre vie.
    Je voterai donc MACRON sans état d’âme pour une raison principale qui est que même battu, le FN sera d’autant plus arrogant et dangereux qu’il aura un fort pourcentage.
    Å plus de 40% le risque sera grand de voir ses militants les plus extrémistes et d’autres groupuscules fachos former des milices et provoquer et tabasser des « non français de souche » dans les rues, s’en prendre activement au droit à l’avortement, etc…
    Cordialement,
    Cassius

  6. Excellente initiative que je ne peux qu’encourager, le coup du « front républicain » n’étant pour moi qu’une vaste escroquerie électorale visant moins a combattre un ennemi commun qu’a instrumentaliser des peurs pour rallier le système, et par la même occasion, faire taire toute revendication politique et émancipatrice sérieuse (On le sait depuis l’épisode Boulanger…). De ce point de vue, le fait que Mélenchon ait refusé de participer à cette mascarade ne peut que m’enthousiasmer au plus haut point; c’est peut-être la un premier pas vers une autonomisation d’un camp socialiste authentique qui cesserait de se compromettre dans le marigot de la démocratie libérale de marché avec ses représentants de gauche comme de droite…

  7. Manuel de stratégie politique.

    Pour être sûrs de gagner
    VOTEZ COUILLON.
    Au premier tour:
    Les pauvres ont voté Lepen pour se venger de la droite qui les ignore et la gauche qui les trahit.
    Ils ont maintenant le choix entre Macron qui les méprise et Marine qui se moque d’eux. C’est quand même mieux de se faire exploiter par des capitaux Français, n’est ce pas?
    Les électeurs de droite, grands stratèges aussi, ont voté aux primaires pour dégager Sarkozy et ils ont eu Fillion, avec ses costards à 13000€, éliminé du premier tour.
    Les électeurs de gauche, afin de gauche!! Les socialistes quoi! Ont voté aux deux primaires , fins stratèges aussi, pour éliminer on ne sait plus qui ! pour finir avec Hamon à 6% au premier tour.

    Hamon, malgré sa solitude, la majorité des socialos partis à la soupe chez Macron, ne voulait pas s’alllier à Mélenchon, car il croyait sûrement au père Noël.
    Ceux, qui vraiment de gauche, avaient peur du FN , on eu aussi leur stratégie foireuse. Ils ont voté Macron, amené donc au second tour.
    Qui a gagné en définitive ?
    On sait déjà qui a perdu.
    Ben tout le monde. Grâce aux couillons de la stratégie politique !
    Qui a gagné? Ceux qui ont fabriqué ce nouveau légume OGM, élevé hors sol , Le Macron.
    Que faire maintenant ?
    Les laisser se démerder et préparer les législatives.
    On aura rien sans risque.
    C’est un problème hydraulique. Plus on monte de digues plus le niveau monte.
    Depuis plus de 20 ans , on monte un frond Républicain , et le FN est passé de 4% à plus de 21% aux présidentielles. Et à plus de 40% dans de nombreuses régions.

    Donc le piège à cons est prêt pour le second tour.
    On boufera du Macron pendant 5 ans.

    Si on continue comme ça , il n’y aura pas un second tour la prochaine fois.
    À bientôt.

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