Société

Mon mail au père Noël 2021

Très cher père noël, sois fier de moi. As-tu vu mon PIB ? En rut historique pour 2021. Mon carnet de vaccination ? J’attends ma troisième dose. Mes idéaux ? Bien rangés dans mon « bip » au fond à droite. Ainsi, tu auras noté mon extrême docilité dans ce monde hostile. Je plie mais ne romps pas, aigri je ne bronche pas. Je suis dans le dur, et pourtant je dois encore serrer les fesses. 

Non, non, je ne me plains pas, pas du tout. D’ailleurs, on me rappelle assez souvent que se plaindre n’est pas retenu comme une preuve suffisante de souffrance. Et si je n’avais pas compris la nuance, il y a cette phrase qui revient en boomerang à celui dont le ressenti se cogne au réel : « la France ce paradis qui se croit en enfer ». Il n’a pas tort le Tesson, et s’il n’a pas tort c’est donc qu’il a raison ? Evidemment, répondra le logicien obtus armé de son tiers exclu : « si c’est pas faux, c’est donc que c’est vrai ! »

Sauf que chez nous, les neuneus, ce petit raisonnement binaire / primaire bien sympathique atteint vite ses limites. Par exemple, ce n’est pas parce qu’on a pas mangé qu’on a pas faim ; ce n’est pas parce que l’on coule entre Calais et Douvres qu’on a le droit de mourir. Ainsi donc, cette petite pirouette logique qui ressemble à un raisonnement par l’absurde peut facilement donner des résultats… absurdes.

Mais je m’égare et t’imagine mordre tes joues pour ne pas bailler. Je voulais juste te donner quelques nouvelles du bien vivre ensemble qui ne vit pas très bien ensemble en ce moment. C’est quand même important je trouve, car tu as beau nous apporter des cadeaux que l’on mérite, cela ne soigne pas pour autant les maux que l’on hérite d’une époque à fleur de peau.  

Très cher père Noël, je sais bien que tu n’existes pas, je ne suis pas complètement débile. Mais savoir n’empêche pas d’y croire. « La foi est la ferme assurance qu’on espère, la démonstration des choses qu’on ne voit pas », Saint Paul. Je sais bien que je ne gagnerai jamais au loto, mais comme un gland j’ai pris un ticket. Je sais bien que les soucoupes volantes n’existent pas, pourtant j’ai parfois l’impression de lire quelques tweets d’extraterrestres. Et puis il y a un exemple imparable qui te parlera j’en suis sûr : la dinde de Noël…

Depuis le temps qu’elle se fait engraisser chaque année, la dinde, pour se faire couper la tête au dernier moment, elle doit avoir quelques doutes quand même. Je veux bien que le genre gallinacé soit pas loin de la fougère niveau QI, mais quand même. À sa décharge, heureusement qu’elle est si bête car sinon le scientisme serait notre religion à tous. En effet, les initiés reconnaitront dans la dinde de Noël la fameuse dinde de Russell…

Bertrand Arthur William Russell (1872-1970)

Russell donc, pas Kurt le shérif adjoint de la série Bonanza, mais Bertrand le célèbre penseur (logicien, mathématicien, philosophe, etc…). Il vît dans la dinde de Noël la preuve irréfutable que ce n’est pas parce que le soleil s’est toujours levé au petit matin, qu’il se lèvera demain. Ce n’est pas parce que le couple Machine Learning – Big Data est capable de prévoir ce que vous achèterez dans cinq minutes que vous allez forcément prendre votre tablette et cliquer sur Amazon. Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas eu de pandémie depuis la grippe espagnole que nous n’en aurons jamais plus, si vous voyez ce que je veux dire.  

Cette limite au scientisme, certains l’ont très bien assimilé. La finance par exemple qui voyait là un très bon moyen de protéger ses arrières. En effet, la finance prend bien garde de toujours vous prévenir avant que lui confiiez votre épargne : « les performances passées ne présagent pas des performances futures », tout comme la dinde donc, dont les jours passés à engraisser ne présageaient pas qu’on lui coupa la tête le jour venu.   

Au fait, avant que j’oublie. Prends garde. Il parait qu’on a un nouveau variant qui débarque. Si tu entends dire « Omicron » alors que t’apprête à passer par la cheminée, je t’invite à rebrousser chemin. En effet, je ne doute pas que tu en sois déjà à une cinquième dose de vaccin, mais bon. Comme je sais que tu n’es pas fâché avec le saucisson, et que ta barbe blanche n’est pas un postiche, j’imagine que tu es classé personnel sensible, aussi je ne voudrais pas qu’il t’arrive des bricoles. En effet, on compte encore sur toi l’année prochaine, voire les autres aussi.

Prends garde à toi donc, oublies pas tes mitaines, et ta hotte bien entendu, surtout ta hotte (pleine).

Bien à toi Noël,

La bise à madame,

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