Culture

Dix livres de 2016 à (se faire) offrir pour Noël

La fête de Noël approche à grands pas et sa débauche consumériste avec. Comme pour les deux années précédentes, au Comptoir, nous avons voulu joindre l’utile à l’agréable et vous proposer une sélection de livres à offrir, tous sortis dans le courant de l’année 2016. Ces ouvrages sont ceux que la rédaction a trouvé, pour diverses raisons, les plus intéressants. Ils sont à l’image des affinités politiques et intellectuelles de l’équipe. Nous vous souhaitons de passer un joyeux Noël et de ne pas perdre de vue ce qu’est l’esprit de cette fête : un moment de partage fraternel.
NB : il est évidemment fortement déconseillé d’acheter ces livres sur Amazon ou à la Fnac.
  • La nouvelle lutte des classes – Les vraies causes des réfugiés et du terrorisme, de Slavoj Žižek, Fayard [1]
  • Le Rapport de Brodeck – Tomes 1 & 2, de Manu Larcenet, Dargaud [2]
  • Numéro 11, de Jonathan Coe, Gallimard [3]
  • La Pièce, de Jonas Karlsson, Actes Sud [4]
  • Les visages pâles, de Solange Bied-Charreton, Stock [5]
  • Internet – L’illusion démocratique, de Ippolita, La Différence [6]
  • Jean-Jacques Rousseau : Du contrat social (manga), de Variety Artworks, Soleil Manga [7]
  • Chanson douce, de Leïla Slimani, Gallimard [8]
  • Utopie et socialisme, de Martin Buber, L’échappée [9]
  • George Orwell : La ferme des animaux (bande dessinée), L’échappée [10]

« Pour savoir écrire, il faut avoir lu, et pour savoir lire, il faut savoir vivre. » Guy Debord

Marx 2.0 [1]

zizekLe philosophe subversif slovène signe là un essai plus que jamais d’actualité. Pour Žižek, ce qui menace notre mode de vie n’est pas l’afflux de réfugiés mais bien le capitalisme mondialisé. C’est avant tout la mondialisation de l’agriculture et le rôle joué par les instances internationales (de la Banque mondiale au FMI) qui ont précipité la crise dans les pays du Sud. Au-delà de transformer les individus en simples agents économiques déshumanisés, le Capital impose le consumérisme à un tiers-monde dont il exploite les richesses et tue les forces vives. Voilà ce qui pousse une partie de la jeunesse à vouloir rejoindre un Occident idéalisé, un Occident qui semble néanmoins la rejeter. Finalement, « la permissivité hédoniste […] [du] marché mondial n’a pas engendré la tolérance universelle mais a déclenché une nouvelle vague de ségrégation raciste. »

Par ailleurs, Žižek dézingue une gauche se félicitant de la libre circulation d’hommes, dans lesquels elle ne voit que des porteurs de nouvelles cultures favorisant la diversité. C’est surtout pour elle l’occasion d’exercer sa supériorité morale. Comme le rappelle Oscar Wilde, il est plus facile de sympathiser avec la souffrance qu’avec la pensée. Contre le sentimentalisme, Žižek en appelle au devoir d’agir selon des principes. Il rappelle (parfois avec trop d’insistance) que tous les réfugiés ne sont pas bienveillants, ni intégrables. On déplorera sa tendance à croire que la gauche officielle n’est que tolérance à l’égard des réfugiés, des immigrés et des musulmans. C’est oublier Valls et ses expulsions de Roms, le démantèlement des camps et les solutions “rustines” proposées par le gouvernement, ainsi que le traitement des réfugiés syriens.

Ludovic Alidovitch

Les âmes noires [2]

Dans un village isolé d’Europe de l’Est, un drame odieux s’est produit. Brodeck, le seul absent de cet “événement”, est chargé de rédiger un rapport pour raconter ce qui s’est passé. Cela aurait-il un lien avec l’arrivée de l’étranger, « der Anderer » (l’autre), artiste débraillé et lunaire, survenue quelques mois plus tôt ? Brodeck accepte, craignant pour sa vie et celle de sa famille.

13872641_967259936719705_5951429755235354510_nAprès avoir exploré la folie errante d’un marginal avec Blast, Manu Larcenet continue de creuser la veine tortueuse de l’âme humaine en adaptant le terrible récit de Philippe Claudel, s’enfonçant dans les tréfonds ignominieux de l’Histoire. Si Blast, au terme d’un voyage extravagant, dévoilait une abyssale cruauté dans le dernier tome, il ne faut que quelques pages du Rapport de Brodeck pour saisir la lourde destinée qui enveloppe ce village. Les horreurs de la guerre ont imbibé de leurs poisons la chair des habitants, générant un climat de violence délétère. Le rapport que rédige Brodeck sera pour lui l’occasion de régler ses comptes avec un passé proche qui le hante. Lui qui a subi de plein fouet la lâcheté et la trahison des “siens” : « Depuis longtemps, je fuis la foule car tout est venu d’elle… La guerre… Et les Kazerskwirs qu’elle a ouverts dans le cerveau des hommes. On peut se rassurer en disant que la faute incombe à ceux qui l’exhortent. C’est faux. La foule est un corps solide, énorme, tricoté de milliers d’autres corps conscients. Il n’y a pas de foule heureuse ni paisible. Derrière les rires et la musique, le sang chauffe et s’agite. Je les ai vus, moi, les hommes à l’œuvre, quand ils ont la certitude de ne pas être seuls… »

Le trait sombre de Larcenet épouse la parabole de la destruction de l’homme par l’homme tracée par Claudel. Le nœud qui enserre le ressentiment individuel au crime collectif est le fruit pathétique de cette crainte irrationnelle envers autrui. Reste la parole pour témoigner, l’art pour sublimer et l’exil pour renaître.

Sylvain Métafiot

Quelque chose de pourri au Royaume-Uni d’aujourd’hui [3]

coe-11Jonathan Coe est probablement l’un des meilleurs romanciers anglais de sa génération. Qu’il s’agisse des années Thatcher ou des années Blair, il nous a habitués à des textes incisifs et drôles sur une société britannique aussi fascinante qu’affolante. Dans Numéro 11 (Number 11), il poursuit ce travail en décrivant l’Angleterre des conservateurs qui ne veulent rien conserver.

La recette est toujours la même : un protagoniste, issu d’une prestigieuse université (comme l’auteur), à la fois fin et désabusé, qui se retrouve confronté à un réel qui le dépasse. Dans ce cas, le réel tourne autour d’un numéro fétichisé par l’écrivain : un onzième roman, un numéro de rue, un numéro de bus, un nombre d’étages souterrains…

Au-delà de l’humour grinçant et des références savoureuses, c’est un monde impitoyable à tous les niveaux que décrit Coe : une industrie du spectacle qui hystérise des masses hyperconnectées autant qu’elle humilie une chanteuse déchue, un monde de la recherche soumis au diktat de la rentabilité et du divertissement, un journalisme mis au service de puissances écrasantes, des banques alimentaires qui fleurissent au service de parties de plus en plus larges de la population et une accumulation déconcertante de richesse entre certaines mains. Un univers néolibéral et austéritaire où, tandis que disparaissent les bibliothécaires, apparaissent les promeneurs de chiens. L’influence d’illustres chasseurs de faux progrès, tels que Simone Weil et George Orwell (que Coe admire), n’est pas bien loin.

Adlene Mohammedi

Cauchemar en espace ouvert [4]

9782330048211En mai dernier, les éditions Actes Sud publiaient la traduction du second roman de Jonas Karlsson, sobrement intitulé La Pièce. Petit par son nombre de pages (188), La Pièce est en revanche important par son contenu.

L’intrigue tient à un fil : le narrateur a été transféré à un nouveau poste dans les bureaux de l’Administration. Son zèle intransigeant et son désir de grimper les échelons rendent les relations avec ses collègues complexes et difficiles. Il découvre un jour une pièce – un bureau on ne peut plus ordinaire – dont tout le monde semble ignorer l’existence ; il s’y réfugie alors de plus en plus régulièrement, comme pour s’y ressourcer…

Si le récit s’inscrit dans une veine purement kafkaïenne, c’est pour mieux illustrer le cauchemar du travail en “espace ouvert” et dénoncer en filigrane la folie sous-jacente à l’hyper-rationalisation du travail, avec les valeurs qu’elle implique : performance déshumanisante, rentabilisation du temps et de l’espace, hiérarchisation rigide, mise en concurrence impitoyable des travailleurs, etc. Le problème du narrateur tient paradoxalement à son intégration profonde de ces valeurs bien actuelles, à son adhésion inconditionnelle et jusqu’au-boutiste, qui le contraint à sacrifier tout lien social, toute chaleur humaine, et qui finira par lui faire perdre pied. Le dénouement du livre, très réussi, nous indique qu’elles ne peuvent conduire que droit dans le mur. Vertigineux.

Maxime Roffay

Pauvres petits enfants gâtés [5]

9782234078116-001-x_0Déjà connue pour avoir dézingué les classes moyennes par l’intermédiaire de ses personnages dans ses deux premiers romans, Solange Bied-Charreton a ressorti la mitraillette pour la rentrée littéraire. Cette fois, elle s’intéresse à son propre milieu social, en racontant l’histoire des Estienne, une famille bourgeoise française contemporaine, (dé)composée de deux parents divorcés, et de trois enfants aux trajectoires différentes. Après la mort du grand-père, propriétaire d’un empire industriel de la brosse à dent, de vieilles plaies vont se ré-ouvrir et tout ce petit monde va se chamailler. La raison principale de la discorde ? La Banéra, maison familiale hantée par les souvenirs, et dont Jean-Michel, le père de famille, veut se séparer. Cette décision provoque l’ire des mômes – Hortense, Lucile et Alexandre –, qui réagissent chacun à leur manière : contre leur famille, contre le monde moderne, mais aussi contre eux-mêmes.

Sans adopter la folie lexicale de Philippe Muray – l’écriture est, malgré quelques passages brillants, très sobre –, on sent qu’il y a derrière ce livre une grille de lecture et une ironie toutes murayiennes. L’auteure prend un malin plaisir à jouer sur les clichés liés à la bourgeoisie, à précipiter ces bien-nés dans des situations tout à fait ridicules, à les cantonner à leur petit milieu social dans lequel ils restent engoncés et fiers, malgré tout. Sur fond de polémiques liées au mouvement social de La manif pour tous, les personnages se montrent tantôt crispés sur des valeurs caricaturalement conservatrices, sans être prêts à grand-chose pour les défendre, tantôt je-m’en-foutistes, regardant passer les trains, s’adaptant aux lois du Marché qui provoquent pourtant le désespoir, cela même au sein des classes les plus aisées. On les plaindrait presque, tant ils ne semblent pas un seul instant se rendre compte que c’est avant tout l’époque, faite de calculs égoïstes et dépourvue de projet autre que le confort matériel de tous à tout prix, qui les rend véritablement malheureux.

Dans le numéro de la Revue des deux mondes de juillet dernier, Michel Houellebecq déclarait : « Même quand on a une vie nulle, on peut faire quelque chose de beau. » Solange Bied-Charreton démontre magistralement avec Les visages pâles qu’on peut être riche mais avoir une vie nulle, et passer à côté de tout ce qui est beau.

Noé Roland

Résister au libéralisme connecté [6]

sans_titre_1Collectif italien déjà auteur de deux ouvrages critiques sur le numérique (Le côté obscur de Google, J’aime pas Facebook), Ippolita est revenu en 2016 avec un brillant petit livre tout récemment traduit en français et postfacé par le philosophe Bernard Stiegler. Dans Internet – L’illusion démocratique, Ippolita s’attache à démonter l’un de nos grands mythes contemporains : le Réseau serait intrinsèquement libérateur, démocratique et progressiste. Derrière cette éloge de la technique se cachent cependant des logiques humaines et commerciales qu’il est nécessaire de débusquer.

Ainsi, Ippolita considère que la notion de web 2.0, qui résonne positivement dans les têtes puisqu’elle désigne depuis 2004 une nouvelle manière d’envisager Internet – horizontale, participative, collaborative –, masque une domination de moins en moins discrète des Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon), les grandes entreprises américaines du web. Cette domination est soutenue par des logiques marketing et libérales qui asservissent les êtres humains, finissant par les réduire au rang de marchandises par le biais du crowdsourcing. L’analyse est complétée par une étude de cas très intéressante sur les stratégies de communication numérique du Mouvement 5 étoiles, qui est en train de s’implanter dans le paysage politique italien par le biais de son leader Beppe Grillo et de son éminence grise Gianroberto Casaleggio, spécialiste en e-marketing.

En réaction face à un Internet de plus en plus dominé par de tentaculaires plateformes, Ippolita nous invite judicieusement à relire Ivan Illich, qui prône l’utilisation par les êtres humains d’outils à leur mesure. Il s’agit moins alors de créer des contre-modèles capables de dépasser les Gafa que de multiplier les poches de résistance à travers l’utilisation de nouveaux « outils conviviaux ». Dans son excellente postface, Stiegler revient lui aussi sur la nécessité de ne plus se contenter de s’opposer : face aux maîtres d’Internet, face à l’ubérisation de l’économie, et face aux projets transhumanistes, l’urgence est de libérer les énergies créatrices des forces d’opposition au monde qui advient devant nos yeux sidérés.

N.R.

Du Contrat social en manga [7]

ducontratsocial-1170x1664Il n’est pas toujours aisé de se plonger dans l’ouvrage majeur de Jean-Jacques Rousseau : Henri Guillemin le décrivait comme « difficile, pas tellement clair ». Variety Artworks, un collectif de dessinateurs japonais, vient d’en proposer une adaptation en manga particulièrement réussie. Se limitant au livre I du Contrat social, le manga donne surtout à voir l’influence des idées de Rousseau dans le mouvement révolutionnaire de 1789. Il met en scène deux livreurs, William et Roy, travaillant et vivant dans des conditions très difficiles. Montaire, jeune aristocrate érudit, se fera la voix de Rousseau pour leur peindre une société d’égalité et de paix, et les encourager à la conquérir par une révolution.

Jean-Jacques Rousseau est lui-même un personnage du manga, intervenant à plusieurs endroits pour apporter des précisions théoriques, s’adresser directement au lecteur, et même pour distribuer quelques baffes ! Variety Artworks a su retranscrire à merveille le caractère badin et provocateur du philosophe genevois à travers son personnage, et rendre sa pensée accessible aux jeunes publics, tout en la respectant à un point qui réjouira les rousseauistes “historiques”. Dans la même collection, des ouvrages de Marx ou Nietzsche ont également été adaptés avec le même bonheur.

Frédéric Santos

Crimes et aliénation [8]

slimaniNée à Rabat en 1981, Leïla Slimani a exercé le métier de journaliste avant de se consacrer à l’écriture. Chanson douce, son deuxième roman, a remporté début novembre le très convoité prix Goncourt.

Le lecteur est happé par l’effroi dès les premières pages. La romancière inaugure son récit avec une scène du crime, avant de remonter le fil du temps et de la tragédie. Inspiré par un fait divers qui s’est déroulé en 2012 aux États-Unis, Leïla Slimani transpose en France l’histoire d’une nounou portoricaine qui a assassiné les enfants qu’elle gardait.

La dénonciation des conditions dégradantes du travail et en particulier celui des femmes est au cœur du roman. Mère de deux enfants, Myriam décide de reprendre son métier d’avocat non sans de pénibles et douloureux sacrifices. Avant cela, elle a mené, avec l’aide de son mari, une série d’entretiens afin de trouver la nounou à qui ils pourront confier leurs enfants. C’est à ce moment-là que Louise est engagée. Cette dernière a « des airs de Mary Poppins » tout en traînant un tempérament névrotique.

Nous découvrons au fil du roman la condition misérable dans laquelle vit Louise. Veuve, elle loue un vieil appartement à un propriétaire malfrat qui abuse de son capital. Très tôt, chaque matin, Louise traverse la région parisienne comme des milliers de travailleurs pour aller garder les deux enfants de Myriam à Paris. Très vite et grâce à son savoir-faire, elle gagne l’estime de ses employeurs et l’affection de leurs enfants.

Or, l’aliénation par le travail ne cesse de gagner Louise. Délaissée par sa fille, elle vit avec les innombrables dettes que son feu et fou mari lui a laissées. La déliaison, chère à Houellebecq, s’ajoute à ces malédictions qui ne touchent que les pauvres gens. Incomprise par cette famille d’« intellectual middle class » bourgeoise qui l’emploie et qui ne peut s’imaginer son quotidien. Le monde moderne et capitaliste finira par la déshumaniser avant de la pousser à commettre l’inhumain.

Shathil Taqa

Éloge du socialisme romantique [9]

utopie_et_socialismeEn 1848, dans le Manifeste du Parti communiste, Karl Marx et Friedrich Engels définissent leur théorie de “socialisme scientifique”, en opposition au “socialisme utopique” des premiers socialistes dont faisaient partie Charles Fourier, Étienne Cabet ou Robert Owen. Ces derniers sont alors supplantés par le marxisme qui domine le socialisme. Pourtant, l’utopisme n’est pas abandonné par tout le monde. Peu connu en France, c’est notamment le cas de l’israélo-autrichien Martin Buber, figure majeure du “judaïsme libertaire”. Patrick Marcolini et les éditions L’échappée ont décidé de publier pour la première fois en France un de ses principaux essais politiques : Utopie et socialisme (Pfade in Utopia, 1950), avec une préface du philosophe Emmanuel Levinas qui date de 1977.

L’auteur y réhabilite les premiers socialistes, dont il complète les idées avec celles de Pierre-Joseph Proudhon, Piotr Kropotkine et son ami Gustav Landauer. Dans sa présentation Marcolini souligne que Buber s’appuie sur un romantisme, « qui a pour caractéristique de s’appuyer sur une vision du monde plus ou moins idéalisée des formes de vie traditionnelles et des sociétés anciennes pour critiquer le monde moderne avec son économie de marché omniprésente, ses structures administratives et politiques aliénantes, sa technique surdéveloppée. » Enfin, son socialisme est communautaire, car il croit que les rapports de voisinage, de travail et d’entraide peuvent permettre de faire émerger des structures de vie collective égalitaires et libertaires. L’objectif est de fédérer la société en communauté des communautés. Un livre incontournable pour le socialisme non marxiste.

Kevin “L’Impertinent” Victoire

Orwell en bande dessinée [10]

le_ferme_des_animauxEn 1945, paraissait, après des refus de plusieurs éditeurs, La Ferme des animaux, premier grand succès littéraire de George Orwell. Satire dirigée contre l’URSS, ce roman est souvent mal compris. Pour l’écrivain britannique qui estime que « rien n’a plus contribué à corrompre l’idéal originel du socialisme que cette croyance que la Russie serait un pays socialiste », il n’est évidemment pas question de condamner en bloc tout mouvement révolutionnaire. Mais pour Orwell, « la destruction du mythe soviétique est essentielle […] pour relancer le mouvement socialiste ». Ainsi, dans une lettre adressée à Dwight Macdonald, l’écrivain explique : « La morale selon moi, est que les révolutions n’engendrent une révolution radicale que si les masses sont vigilantes et savent comment virer leurs chefs dès que ceux-ci ont fait leur boulot. »

Quoi qu’il en soit, les conservateurs ont tenté maintes fois de récupérer cette œuvre. En 1951, la CIA et les services secrets britanniques décident d’adapter le roman en BD. C’est la version mauricienne de cette œuvre que les libertaires des éditions de L’échappée ont décidé de publier pour la première fois en français. Traduite du créole par Alice Becker-Ho – poète et accessoirement seconde épouse de Guy Debord – et excellemment présentée par Patrick Marcolini, cette BD ludique de 90 planches tient toutes ses promesses, car même passée par le filtre de la CIA, l’œuvre d’Orwell garde toute sa puissance.

K.V.

Nos Desserts :

Catégories :Culture, Shots et pop-corns

Tagué:,

1 réponse »

Laisser un commentaire