Politique

Vous avez dit « gauche réac » ?

La gauche n’a jamais semblé aussi divisée qu’aujourd’hui. Si certains se revendiquent clairement progressistes, d’autres, plus réticents, se questionnent davantage et s’attirent les foudres des premiers. Les insultes fusent, les coups bas pleuvent. Parmi ces attaques, le terme de « réactionnaire » revient quasi automatiquement pour qualifier quiconque ne s’inscrit pas dans ce mouvement en avant. Alors, existe-t-elle réellement, cette « gauche réac », ou n’est-elle qu’un fantasme ?

MichéaUne nouvelle famille politique semble émerger : les réacs de gauche. Y appartiendraient des personnalités aussi diverses que Jean-Claude Michéa, Laurent Bouvet, Christophe Guilluy, Michel Onfray, Aurélien Bernier, Jean-Pierre Le Goff, Jacques Sapir, François Ruffin, Coralie Delaume, Marcel Gauchet, Régis Debray, Cédric Biagini des éditions de l’Échappée, Jack Dion, François Jarrige, Emmanuel Todd, Dany-Robert Dufour, Marie-Jo Bonnet, Jérôme Leroy, Alexis Escudero, Serge Latouche, le collectif techno-critique Pièces et Main d’œuvre, Denis Collin, Frédéric Lordon, Vincent Cheynet, Sylviane Agacinski, Hervé Kempf, etc. Les plus téméraires vont même jusqu’à ajouter à cette liste Jean-Luc Mélenchon ou José Bové. Le « torchon » Marianne serait leur Bible et Jean-Pierre Chevènement, leur père politique.

« Ce qui nous incite à revenir en arrière est aussi humain et nécessaire que ce qui nous pousse à aller de l’avant. » Pier Paolo Pasolini

impasse-du-progres2Cette « nouvelle gauche réactionnaire », qui effraie tant la majorité de la gauche et fait le bonheur d’une partie de la droite, remet en question certains dogmes de sa famille politique. Des membres de cette gauche-là ont l’outrecuidance de défendre la nation comme cadre politique – sans pour autant faire de celle-ci « le fantasme ethnique que propage le FN » (Lordon) –, d’autres critiquent le multiculturalisme – sans pour autant faire des immigrés une menace pour une « identité nationale » fantasmée –, d’autres encore prennent du recul sur certaines « avancées sociétales » – sans pour autant penser que toute réforme sociétale est mauvaise ou inutile –, et les pires remettent carrément en cause la « religion du Progrès » – sans pour autant être de vils obscurantistes hostiles à tout progrès. Les plus impertinents vont même jusqu’à témoigner du respect à certaines personnalités classées à droite, souvent des souverainistes antilibéraux[i]. Mais en y regardant de plus près, on est loin d’une famille homogène, puisque nous y retrouvons pêle-mêle des libertaires (comme Cédric Biagini), des communistes (comme Jérôme Léroy), des sociaux-démocrates (comme Laurent Bouvet) ou des décroissants (comme Vincent Cheynet). Parmi cette liste non exhaustive, nous retrouvons même des personnalités ouvertement antagonistes comme Frédéric Lordon et Jean-Claude Michéa, qui se sont bastonnés il y a deux ans. Mais surtout, ce concept n’a pas de sens et sa popularité récente révèle surtout l’état de paralysie intellectuelle dans laquelle est placée une partie de la gauche.

Des gauches qui n’ont rien de « réac »

« Tout d’un coup, il m’est devenu indifférent de ne pas être moderne. » Roland Barthes

Depuis le début du XIXe siècle, la gauche n’est pas un camp politique homogène. Elle est divisée en plusieurs grandes familles, qui peuvent parfois se recouper : libéraux progressistes, jacobins et socialistes[ii]. Cependant, toutes partagent un idéal de transformation incompatible avec la réaction. À l’origine, le réactionnaire est celui qui rejette la révolution de 1789 et rêve d’un retour à l’Ancien Régime. Mais la quasi-disparition de la vieille droite monarchiste et cléricale après 1945 a fait évoluer le terme. Depuis, l’adjectif « réactionnaire » désigne principalement des individus qui rejettent entièrement le présent, vu comme décadent, et idéalisent le passé. Les « néo-réactionnaires » d’aujourd’hui ne se concentrent plus sur 1789, mais sur Mai 68. Le meilleur exemple est donné par le polémiste Éric Zemmour, qui voit dans le mouvement étudiant une « révolution encore plus importante que 1789 », qui a engendré « la grande destruction de la France » et a permis le « règne des minorités ». Il apparaît dès lors évident qu’une grande partie – de Frédéric Lordon à François Ruffin – de la liste énumérée précédemment n’a rien de « réactionnaire ».

Proudhon1Il est néanmoins vrai que d’autres, à l’instar de Michéa, se montrent très critiques à l’égard de Mai 68 et n’hésitent pas à prendre appui sur le passé. Cependant, aucun d’entre eux ne rêve d’un grand retour en arrière, même s’ils aspirent à une nouvelle société qui s’enracine sur certaines valeurs traditionnelles. Plus que des « réacs de gauche », ils incarnent une forme de conservatisme de gauche, en considérant qu’il ne s’agit pas d’un désir d’immobilisme, mais d’une volonté de conserver ce qui a encore humainement un sens, tout en voulant changer ce qui doit l’être. Une position qui n’est pas sans rappeler celle du père de l’anarchisme, Pierre-Joseph Proudhon, qui écrivait en 1848 dans un court texte intitulé Toast à la révolution : « Qui dit donc révolution dit nécessairement progrès, dit par-là même conservation. (…) Nous serons tout à la fois hommes de conservation et hommes de progrès ; car ce n’est qu’à ce double titre que nous serons des hommes de révolution. »

De même, leur critique de Mai 68 n’est pas sans rappeler la « critique éclairée des Lumières » que faisaient les premiers socialistes. Ces derniers dénonçaient les effets « atomisants » – c’est-à-dire isolant les individus – des Lumières, tout en défendant leur caractère émancipateur et leur idéal d’égalité et de liberté. Ainsi, cette critique du gauchisme soixante-huitard [iii] dénonce l’aspect hédoniste et individualiste de la révolte, sans nostalgie pour la France gaulliste de l’époque. Ce socialisme remettant en question la logique de la « religion du progrès » – pour qui demain sera nécessairement mieux qu’aujourd’hui, et tout était mauvais hier – n’est donc pas nouveau. Des figures telles que Charles Péguy, qui attaquait sans concession le monde moderne, Simone Weil, qui estimait que le progrès avait « fait faillite » (Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale, 1934), George Orwell, Georges Sorel (Les Illusions du progrès, 1908) et Dwight Macdonald (Le Socialisme sans le progrès, 1946) se situaient dans ce registre. Ce socialisme s’inscrit en réalité dans le « romantisme révolutionnaire » que le philosophe Michael Löwy définit comme une révolte qui « se fait au nom de valeurs sociales, morales ou culturelles pré-modernes et constitue, à multiples égards, une tentative désespérée de ré-enchantement du monde ». Bien que s’inscrivant contre la modernité – mère du libéralisme – cette tradition ne rêve d’aucun retour en arrière, mais bel et bien d’un dépassement qui prendrait appui sur le passé.

Ce que révèle l’inquisition contre la « gauche réac »

« Je ne suis pas un journaliste de gauche : je ne dénonce jamais personne. » Guy Debord

Gramsci_1922Mais ce qui est inquiétant dans cette chasse aux « réacs de gauche » fictifs, c’est la manière de désigner des ennemis intérieurs au sein de la gauche. L’orthodoxie reproche tout d’abord, par maraboutdeficellisme – stade suprême de la malhonnêteté intellectuelle –, à ces réacs qui n’en sont pas de faire le jeu de la droite, voire de l’extrême droite. Pire encore, certains sont même absurdement accusés de subir l’influence néfaste de certains courants ou penseurs droitiers comme la Nouvelle Droite et son pape, Alain de Benoist [iv]. Pourtant, jusqu’à preuve du contraire, un auteur n’est pas responsable des usages qui sont faits de ses propos : dans le cas contraire, il faudrait oublier des icônes comme Karl Marx ou Antonio Gramsci. Partager une opinion ne signifie pas forcément partager une ligne politique.

Mais ce terrorisme intellectuel est avant tout révélateur de la position dans laquelle est actuellement empêtrée la gauche. Cette dernière a perdu l’hégémonie culturelle qui était la sienne dans les années 1980, au moins sur les questions dites « sociétales » ou morales. Car depuis les années 2000, nous assistons à une « droitisation » de la société française. Ainsi, comme le souligne le politologue Gaël Brustier, « l’imaginaire collectif [et] les représentations sociales ont basculé à droite ». Il ne s’agit cependant pas d’une victoire de l’ancienne droite, mais plutôt d’une réaction négative au « gauchisme culturel » (Jean-Pierre Le Goff), corrélée aux transformations rapides que subit notre société mondialisée. Plus l’orthodoxie de gauche se sent désarmée face à ce phénomène, plus elle cherche en son sein les fautifs, accusés de créer de la « confusion » politique et donc de tromper le peuple en l’emmenant vers la droite. Les réacs de gauche – en dépit de leur inexistence – semblent les coupables tout désignés.

Pourtant, il faudrait se demander qui fabrique réellement de la confusion. Dénoncer une « gauche réactionnaire » hypothétique permet en effet de donner des arguments au centre (gauche et droite) libéral qui, depuis une quarantaine d’années, essaie de démontrer que toute critique du système mène nécessairement aux goulags ou au fascisme, voire aux deux en même temps (cf. La Barbarie à visage humain de Bernard-Henri Lévy, publié en 1977). Le danger est de nourrir l’idée que « le seul débat de notre temps doit être celui du fascisme et de l’antifascisme » (Bernard-Henri Lévy, 1984) et ainsi d’empêcher toute critique rigoureuse du libéralisme, même énoncée par des gens non suspects de « confusionnisme » mais amalgamés à l’extrême droite par facilité intellectuelle.

« Pour défendre le socialisme, il est absolument nécessaire de commencer par l’attaquer. » George Orwell

La dénonciation des « réactionnaires de gauche » en dit donc long sur l’état de la gauche française. En perte de vitesse et de repères, elle n’arrive pas à se réinventer. Malheureusement, si elle s’attaque à tous ceux qui tentent de renouveler son logiciel de pensée, elle se condamne à la défaite.

Nos Desserts :

Notes :

[i] Faut-il par exemple rappeler que Karl Marx « plaçait Cervantès et Balzac au-dessus de tous les autres romanciers » (Paul Lafargue, Souvenirs personnels sur Karl Marx, 1891) ? L’auteur de la Comédie humaine n’était pourtant pas réputé pour être un grand progressiste.

[ii] Les socialistes sont eux-mêmes divisés en plusieurs sous-familles : sociaux-démocrates, communistes, anarchistes. En outre, ce courant politique est traversé par de grandes querelles (socialistes libertaires contre socialistes autoritaires, révolutionnaires contre réformistes, etc.).

[iii] Il ne faut pas oublier que, dès le départ, une partie de la gauche s’est opposée au mouvement étudiant de Mai 68, tout en défendant le mouvement ouvrier. C’était le cas du PCF et de la CGT – qui n’étaient pas exempts de toute critique, loin de là.

[iv] Si Alain de Benoist reste avant tout un héritier intellectuel de la « Konservative Revolution » (révolution conservatrice allemande), force est de constater que la pensée de cet antilibéral décroissant s’appuie également sur de nombreux théoriciens et courants de gauche, qui vont des communautariens anglo-saxons (Michael Sandel, Charles Taylor, Michael Walzer, ou encore Alasdair MacIntyre) aux anarcho-syndicalistes (Proudhon ou Georges Sorel). Il n’est donc pas complètement étonnant pour un homme de gauche de rejoindre le grand « gramscien de droite » sur certaines analyses, sans pour autant avoir basculé politiquement.

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10 réponses »

  1. Très bonne analyse !
    Pour ma part, et de manière complémentaire, j’observe actuellement une guerre idéologique entre trois courants de pensée à gauche, que l’on pourrait, rapidement, qualifier de : libéral, républicain et identitaire (cf. https://cincivox.wordpress.com/2015/03/02/wargame-ideologique-a-gauche/ ).
    Si, comme vous le soulignez, les oppositions sont nettes et parfois violentes entre ceux qui sont stupidement qualifiés de « gauche réac », la plupart se rattachent explicitement ou non au courant républicain, en opposition à la fois au néolibéralisme qui a colonisé une partie de la gauche, et aux tenants d’une conception identitaire et communautariste de la société.

    Cincinnatus
    https://cincivox.wordpress.com/

    • Presque entièrement d’accord avec vous, sauf : « la plupart se rattachent explicitement ou non au courant républicain ». C’est vrai pour beaucoup cité, mais une large partie se rapprochent plus de courants plus libertaires et non (voire anti-) jacobins, comme Michéa, Cheynet, Onfray, Biagini, PMO, etc. En fait, en plus de votre clivage, il en existe un interne aux libertaires, entre certains pour quoi « libertarisme » rime avec « autogestion » et d’autres avec un laissez-faire sociétal.

      • Tout à fait d’accord ! Ma formulation « la plupart » était volontairement floue pour ne pas entrer dans des débats typologiques finalement peu pertinents (je n’aime rien moins que coller des étiquettes sur des individus comme si c’étaient des pots de confiture – l’assignation intellectuelle est aussi indigne et inepte que l’assignation identitaire).
        D’autant plus que certains libertaires (pas tous !) ont, au fond, des considérations très proches des républicains : la référence à la « common decency » chère à Orwell et Michéa, par exemple, pourrait les rapprocher… même si les deux camps s’en défendent ! Et vous faites bien de pointer les clivages internes au libertarisme qui, réciproquement, peuvent en amener d’autres à défendre les thèses des identitaires de gauche.

        Cincinnatus
        https://cincivox.wordpress.com/

      • Je viens d’entendre plusieurs interviews d ‘ Emmanuel Todd. Même brouillée par des journalistes agressifs et incompétents dérogeant à toute déontologie professionnelle (sauf à la RTS suisse) son analyse est éclairante sur le contexte portant Charlie et l’inquiétante radicalisation de la nouvelle petite bourgeoisie des services promue par les 30 Glorieuses et son clivage avec les couches humbles de la société. La gauche majoritaire sociale libérale et europhile a non seulement perdu tout ancrage populaire, mais se mobilise désormais contre les représentants de son terreau originel à l’image de la petite – bourgeoisie historique des années 1930.

      • @Marco

        Todd interprète les manif de janvier comme une manif anti musulmane , à l’instar du mouvement allemand anti islam.
        Sauf que les pancartes étaient pacifiques et rassembleuses (on est tous ceci cela).
        L’autre raccourci qu’il commet est de faire des manifestants des representants de l’ancien ordre monarchique et réactionnaire (dans le sens encyclopédique du terme , pas neoprogréssite) opposés aux habitants des quartiers populaires situés en banlieue, aujourd’hui islamisées , qui seraient eux comme par magie les representants des zones égalitaires ,républicaines et révolutionnaires…or nous savons ce qu’il en est en réalité.
        Sa lecture est tellement biaisé qu’il fait d’une des revendications des manifestants , le refus du délit de blasphème , une revendication anti républicaine , en bon historien il ne peut pas ignorer que le délit fut justement abolit sous la Révolution…et que ceux qui veulent le restaurer viennent précisemment (mais pas seulement) des territoires qu’il protège paternellement
        Autre détail qu’il oublie de préciser , c’est que le tiers des manifestants viennent du bassin parisien et de l’IDF , zone égalitaire et révolutionnaire , sa thèse est donc en partie fausse.

        Il est prisonnier de sa grille de lecture anthropologique et de ses parti pris antiracistes , tous les 2 beaucoup trop statiques…
        Alors que l’originalité de sa pensée vient de sa capacité à allier l’histoire (via l’anthroplogie) et le présent (par la sociologie)…dans cette analyse il y a des éléments qu’il ne veut absolument ne pas prendre en compte , donc il mélange bordéliquement les 2.
        Pire ,quand il repète que pour la première fois il a eu honte d’être français , il tombe de plain-pieds dans le travers des élites qu’il dénonce depuis 20 ans , celles qui nourissent l’auto dénigrement en disant que la France est un pays de feignasses , d’assistés et… de racistes.
        Son propos est tellement confus que ça fait peine à voir , en particulier pour des lecteurs comme moi qui avons été éduqués au républicanisme en lisant ses ouvrages.

  2. Je me reconnais tout à fait de cette gauche-là. Cependant, je répudie le terme « réac ». Je m’inscris comme touts les penseurs nommés dans la lignée des humanistes des Lumières, puis des Jaurès et autres socialistes républicains. Je n’ai aucune parenté avec le bourgeois gentilhomme qu’est Valls qui rêvent de se faire faire grandmamamouchi par le patronat, ni avec le Bidochon qui préside la République française, par erreur.. Ce sont clairement des hommes de droite par absence de culture. Mais il faut aller plus loin et se demander ce que cette gauche là représente: l’émergence d’une nouvelle petite bourgeoisie du secteur tertiaire des services et de la fonction publique issue des Trente glorieuses. Dernier avatar mamamouchiste: cette petite bourgeoisie a fusionné avec la bourgeoisie libérale traditionnelle. Elle a conservé du gauchisme des années 1970 le pire: l’anathématisation systématique du plus proche voisin, le « terrorisme intellectuel », le moralisme cucul (en pédagogie) pleurant sur Calimero. Ces nouveaux venus d’après 1989 ont jeté par dessus bord tout l’héritage de la gauche républicaine, laïque et humaniste pour renouer avec le libéralisme balbutiant du XIXème siècle. Ce sont eux, les réactionnaires. Leur modernité est celle de la montée de l’obscurantisme bavard.

  3. « Malheureusement, si elle s’attaque à tous ceux qui tentent de renouveler son logiciel de pensée, elle se condamne à la défaite. »

    Beau panorama et excellente conclusion , seulement la défaite idéologique et intellectuelle qui dure depuis au moins la fin des années 70 n’est pas fortuite.
    Je suis etonné que vous n’ayez pas fait mention du livre de Daniel Lindenberg « les Nouveaux réactionnaires » , qui a impulsé ce mouvement de répudiation ,puis de scission au sein de la gauche…ou de son éditeur Pierre Rosanvallon , dont se revendique l’ultra libéral Gaspard Koenig !

    Outre l’anti libéralisme , il y a un axiome commun qui rassemble la gauche communo-anarcho-jacobine (malgré les 2 types d’anarchisme) , le même qui rassemble les libéraux de droite et de gauche. : le rapport à l’Etat-nation
    Par cheminement intellectuel ou par héritage culturel les « réac de gauche » estiment que l’on ne peut pas organiser la solidarité , créer et repartir les richesses au dela du cadre national , quand les autres veulent s’en soustraire pour augmenter les marges ou satsfaire une utopie humaniste qui ne se réalisera jamais (un Etat-providence mondial).
    Vous faites bien de rappeler que la ruputure ne se situe pas seulement au niveau du libéralisme : anarchistes et jacobins ne partagent pas du tout la même vision de l’organisation politique mais ce qui les a liés , de manière épisodique dans l’histoire c’est tantôt l’opposition à la Réaction , tantôt les défaites militaires et les capitulations de leurs dirigeants (la Commune était un soulèvement patriotique au départ).
    La plupart des intellectuels et journalistes que vous avez cité incarnent cette ligne , seul le degré d’attachement à l’Etat ou à la nation les distinguent.
    Quelle est la Réaction des années 2010 et quelles sont les capitulations de nos dirigeants d’aujourd’hui ?

    ps: merci pour l’interview de Vincent Cheynet que je connaissais pas.

    • Merci pour votre commentaire, je vous rejoins du début à la fin.
      « Je suis etonné que vous n’ayez pas fait mention du livre de Daniel Lindenberg « les Nouveaux réactionnaires » , qui a impulsé ce mouvement de répudiation ,puis de scission au sein de la gauche…ou de son éditeur Pierre Rosanvallon , dont se revendique l’ultra libéral Gaspard Koenig ! »
      J’aurais en effet pu prendre le temps de l’expliquer, mais j’ai fait le choix de ne parler que des débuts fracassants des « nouveaux philosophes », qui sont ceux qui effectuent le premier pas, même si Lindenberg and co vont bien plus loin. Michéa en parle dans l’interview qu’il a donné à Marianne que j’ai placé en dessert.

  4. L’une des conséquences du moins d’état, c’est l’abandon des cités aux dealers et propagandistes du djihad. Les réponses du gvt Hollande c’est de faire morigener des gamins des banlieues qui osent ne pas se sentir Charlie. De quel droit? La mission de l’instruction publique (ou éducation nationale), ce n’est pas d’imposer des idéologies éphémères, mais d’assurer sur le long terme l »acquisition des aptitudes élémentaires (lire, écrire, compter) pour transmettre progressivement des connaissances plus complexes. C’est par une pratique concrète quotidienne des valeurs qui conduisent à la citoyenneté (respect de l’autre, entr’aide, jeux valorisants, d’assiduité), la création d’un environnement stable et sécurisant et non par des parlotes qu’on transmet les usages démocratiques. Or, ces 3 dernières décennies, on a destructuré les apprentissages élémentaires, disloqué les connaissances par des réformes chaotiques, laissé se dégrader l’environnement scolaire faisant place à la loi du plus fort, affaibli voire supprimé les aides parascolaires, laissé discréditer le corps enseignant. En ce qui concerne la remontée de l’illettrisme depuis les années 1990, principal facteur d’exclusion à long terme et de la délinquance qui en découle, on est dans le déni. Enfin, avec des discours à la con sur la competition découlant de l’idéologie neoliberale on a désenchanté la société, rendu précaire le vivre ensemble. Rétablir un situation normale de ll’instruction publique, la source première et irremplaçable de l’apprentissage de la démocratie est une tâche de titans, exigeant le réinvestissent des moyens materiels et moraux necessaires. Je ne vois et n’entends absolument aucune propositions à la hauteur de ce défi. On est entré dans un cycle nouveau de décadence.

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