Shots et pop-corns

Quelques livres de 2017 à (se faire) offrir pour Noël

La fête de Noël approche à grands pas et sa débauche consumériste avec. Comme lors des deux années précédentes, au Comptoir, nous avons voulu joindre l’utile à l’agréable et vous proposer une sélection de livres à offrir, tous sortis dans le courant de l’année 2017. Ces ouvrages sont ceux que la rédaction a trouvé, pour diverses raisons, les plus intéressants. Ils sont à l’image des affinités politiques et intellectuelles de l’équipe. Nous vous souhaitons de passer un joyeux Noël et de ne pas perdre de vue ce qu’est l’esprit de cette fête : un moment de partage fraternel.

« Pour savoir écrire, il faut avoir lu, et pour savoir lire, il faut savoir vivre. » Guy Debord

L’Amérique, la nouvelle Rome [1]

« Nous nous sommes faits américains. Il est normal que nous trouvions ici tous les misérables problèmes des USA, de la drogue à la mafia, du fast-food à la prolifération des ethnies », écrivait Guy Debord en 1985. Régis Debray rejoindrait le situationniste au moins sur ce point. Dans Civilisation, le “patriote cosmopolite” pose la question « quand l’Europe a-t-elle cessé de faire civilisation ? » L’essayiste distingue la civilisation de la culture. La première exige plus que la seconde. Elle ne se résume pas à une religion ou à une langue, elle a besoin d’un empire. Mais, comme Paul Valéry qui l’inspire tout au long de son essai, Debray constate que les civilisations sont mortelles. Aujourd’hui, ce n’est plus le Vieux Continent qui mène la danse, mais le Nouveau Monde.

Ni pro, ni anti-américain, l’ancien révolutionnaire analyse le grand chambardement en cours. Quand certains voient dans “l’islamisation” le grand péril de nos sociétés, Debray, qui ne sous-estime pas les dangers de l’islamisme, constate d’abord l’américanisation. De Nike à House of cards, en passant par Mac Do, le rap, les GAFA, la religion économiciste ou la prolifération des anglicismes, comment nier l’attrait qu’exerce sur nous la culture américaine, elle-même adossée à un empire ? Debray n’est pas pessimiste pour autant, car « la fin de notre monde n’est pas la fin du monde ». Ajoutons à cela qu’il possède toujours ce style éblouissant et un sens de la formule unique qui fait toujours le bonheur de ses lecteurs.

Kévin Boucaud-Victoire

Michéa dissèque le capitalisme [2]

Pour Le Comptoir, chaque livre de Jean-Claude Michéa constitue un petit événement. Mais cette fois, c’est vraiment spécial, puisque nous avons carrément inspiré l’ouvrage, ce qui nous a valu les foudres de nos ennemis de classe du Monde. Dans Notre ennemi, le Capital, le philosophe socialiste poursuit son analyse du libéralisme – qui constitue, rappelons-le, un projet philosophique, économique, politique et culturel –, sa critique de la gauche, coupable à ses yeux de trahison envers les classes populaires, et sa défense des « gens ordinaires », si chère à son maître George Orwell. Bref, Michéa a écrit pour la sixième fois le même livre.

Néanmoins, cet ouvrage, comme les précédents, apporte sa pierre à la réflexion originale du philosophe. Cette fois, Michéa développe sa défense du populisme, en prenant pour appui l’expérience Podemos en Espagne et la découverte par une partie de la gauche “radicale” des écrits de Chantal Mouffe et Ernesto Laclau. Le socialiste affine aussi certaines de ses analyses, comme l’articulation entre social et sociétal, ou la question essentielle de l’autonomie. Il en profite également pour répondre à ses détracteurs – à commencer par les élucubrations de cette pauvre Isabelle Garo – et nous gratifie de quelques belles punchlines. Pour finir, Michéa poursuit l’analyse de la crise économique du capitalisme – « libéralisme réellement existant » – à partir des deux économistes Ernst Lohoff et Norbert Trenkle, qui démontrent la validité de la théorie marxiste de la “baisse tendancielle du taux de profit”.

K. B. V.

Satire à vue [3]

Sonnez hautbois, résonnez musettes, faites place à sa seigneurie, le chevalier Schenapahnski ! De ce roman satirique, rédigé au cœur du Printemps des peuples par Georg Weerth (1822-1856), se dégage un humour, une intelligence et une verve tout simplement exquis. Un voyage truculent à travers l’Europe où – des contrées de Silésie aux salons viennois, des champs de bataille espagnols à une île perdue en mer du Nord, du banquet du Gürzenichde de Cologne au parlement de Francfort – la quête de gloire, de femmes et de picaille donnent lieu à des situations aussi absurdes qu’hilarantes. Fameux, le chevalier l’est assurément. Et coureur aussi, joueur, volage, sans oublier querelleur et magouilleur, avec une pointe de friponnerie et d’avidité. Schenapahnski a la prestance d’Errol Flynn, la naïveté de Don Quichotte, la folie de Münchhausen et le charme ineffable de Jean Rochefort. Il séduit les épouses aussi élégamment qu’il les détrousse, mais s’enfuit toujours d’un pas leste quand les maris sortent fleurets et pistolets. À travers les péripéties du chevalier, c’est toute la bonne société du XIXe siècle qui est tournée en dérision, des bourgeois repus aux aristocrates cornus en passant par les généraux ballonnés, les politiciens demeurés et les comtesses ratatinées.

Collaborateur de Marx et Engels au sein de la Nouvelle Gazette rhénane où parurent, sous forme de feuilleton entre août 1848 et janvier 1849, les aventures de Shenapahnski, Georg Weerth ne doit sa mince renommée qu’à son poème La Chanson de la faim. Il fut emprisonné trois mois pour avoir “diffamé” le prince Felix Lichnowsky – inspirateur, bien malgré lui, du fieffé chevalier. Satiriste contrarié et révolutionnaire convaincu, Weerth jugeait ses récits moins importants que ceux de Marx, se reprochant d’écrire de « mauvaises plaisanteries pour arracher un sourire falot aux ganaches patriotiques ». La frivolité de sa plume était pourtant trempée dans la plus rouge des indignations : « Et nous en ririons encore si les cadavres des prolétaires de Paris, Vienne et Berlin ne nous ricanaient au nez, de balles criblés, par cet amas rutilant de princes “amis des peuples”, par ces serviles serviteurs et ces dupes de représentants du peuple ; si ne remontaient pas jusqu’à nous les râles des Polonais piétinés, les cris à l’aide des Hongrois torturés et les cris de rage de la Lombardie dévastée par cet écheveau de garanties hypocrites, de mensonges éhontés. »

Sylvain Métafiot

Laissée pour conte [4]

https://www.babelio.com/couv/CVT_Femme-a-la-mobylette_2949.jpgC’est à la redécouverte du roman populaire que nous invite Jean-Luc Seigle – lui-même issu d’une famille modeste – à travers son roman Femme à la mobylette. Populaire parce qu’accessible, mais surtout populaire parce que mettant en scène le vécu des gens ordinaires, qui peuvent enfin trouver des personnages de la littérature qui leur ressemblent, et auxquels s’identifier. Les destins tragiques ne sont pas l’apanage des nobles et de la bourgeoisie.

Loin des clichés qui associent spontanément, par prétention et facilité de réflexion, la pauvreté matérielle à la pauvreté d’esprit ou à l’absence de vie intérieure, Femme à la mobylette montre au contraire combien cette vie intérieure est toute aussi riche, combien les souvenirs, l’histoire familiale, les sentiments, le besoin de s’évader par l’imaginaire sont tout aussi présents, si ce n’est davantage, dès lors que l’on se trouve dans la précarité. Femme seule avec enfants, ainsi que nombre de femmes de notre époque, le personnage principal est pris dans ses contradictions, son désir de subvenir aux besoins de ses enfants et de les conserver avec elle, son désir d’être reconnu socialement et de trouver la liberté et le bonheur en tant que femme. Et c’est au guidon d’une mobylette, moyen de transport par essence populaire, qu’elle va accomplir son destin tragique, à la découverte du monde, à la rencontre de l’amour comme à la recherche de ses enfants escamotés, comme elle irait simplement au travail.

Boris Lasne

« Trouble dans le genre » au pays de la femme à barbe [5]

La_femme_a_barbe_l_echappeeCe petit opuscule, riche en illustrations et paru en cette fin d’année 2017, trouverait toute sa place dans un cabinet de curiosités. Les auteurs y présentent avec humour et moult détails « la vie exemplaire de la femme à barbe », surnom de Clémentin Delait, dont un musée ainsi qu’un documentaire retracent par ailleurs le parcours et les faits d’armes. On y découvre aussi un historique des femmes à barbe, qui questionnent la représentation que l’on se fait de la femme, où l’on réalise que nous sommes aujourd’hui bien plus fermés d’esprit que nos prédécesseurs, et que les femmes n’ont pas attendu les revendications LGBTQ du XXIe siècle pour sortir des carcans du genre.

Les éditions L’échappée signent dans cette réédition enrichie du texte de Nohain et Caradec un ouvrage plein de poésie, de finesse, d’esthétique, qui donne à réfléchir sur la féminité, la force, le courage, et sur ce que fut, est, ou devient le féminisme. Sans idéologie, sans réflexion métaphysique sur les questions de genre, simplement en racontant la vie de Clémentine Delait, elle qui « réalise le type parfait et complet de la femme à barbe », qui reçut du ministre de l’Intérieur Émile Combes le droit de porter le costume masculin, qui entra dans la cage aux lions du dompteur Camillius, et qui tenait en admiration et en respect la clientèle masculine du café de la Femme à Barbe et de tout le village de Thaon-les-Vosges (qui le lui rend bien). De quoi rester béat d’admiration face à cette femme fascinante, de poigne et de conviction, qui nous offre matière à réflexion au fil des pages agrémentées de nombreuses photos, garantissant à chacun de ressortir de cette lecture joyeux, inspiré, interrogé, ragaillardi, mais en tout cas, touché à coup sûr. Une chouette idée de cadeau, pour les petits, les grands, les femmes, les hommes, les jeunes et les moins jeunes !

Mathilde Marchand

Libérer les musulmans des faux débats [6]

« Nous traversons une époque faite de contresens. La novlangue des puissants ou le sabir des contestataires ne sont pas étrangers à cet état de fait ». C’est ainsi que le docteur en sciences politiques Nedjib Sidi Moussa commence son premier essai, dans lequel il tente, une bonne fois pour toutes, d’éteindre les débats identitaires passionnés qui courent en France autour de la figure fantasmatique qu’est devenu le musulman. En sept chapitres et moins de 150 pages, l’auteur démonte point par point les ambiguïtés, mythes politiques et autres racontars qui concernent l’islam dans notre pays. Faux républicains à la laïcité variable, représentants autoproclamés d’une “communauté musulmane” fictive, intellectuels indigénistes et indigestes ou authentiques racistes de la droite radicale sont, à tour de rôle, accusés d’entretenir le feu d’un débat malsain qui crée de la xénophobie et occulte la question sociale. En essentialisant – volontairement ou pas – une partie des Français, en s’écharpant sempiternellement sur des questions religieuses, ces bataillons ridicules autant que dangereux évacuent en effet toute la complexité d’un monde en train de muter et permettent à la “lutte des races” de prendre le pas sur la lutte des classes.

Dans le contexte délétère qui est le nôtre, la lecture de ce petit livre plein de bon sens, de nuances et de raison sera profitable à tous, sauf aux entrepreneurs de la division qui y récoltent une bonne douche froide. À lire d’urgence si ce n’est déjà fait.

Noé Roland

Aux origines modernes de l’autogouvernement [7]

22520100531390LQu’est-ce que le communisme des conseils, à part un épiphénomène historique, quelques paragraphes dans un manuel d’histoire du socialisme et une poignée de noms glorieux (Anton Pannekoek, Rosa Luxemburg, Cornelius Castoriadis…) ? Yohan Dubigeon répond à cette question en publiant sa thèse de doctorat sur le “conseillisme”. Passionnante enquête sur ce qui fut à la fois une expérience politique – la démocratie des conseils ouvriers – et un courant idéologique partagé en deux courants – communisme dit “de gauche” et communisme “de conseils” –, elle tend à démontrer en quoi le conseillisme, peu étudié, a été et demeure riche en analyses comme en pratiques politiques. Si ce courant est historiquement vaste et parcouru de dissensions, Dubigeon retient quelques éléments clés, que l’on pourrait résumer en une opposition simultanée à l’anarchisme et au léninisme. D’un côté, le conseillisme refuse le “substitutisme” léniniste, conçu comme une « survalorisation du rôle de l’organisation par rapport à la spontanéité révolutionnaire, poussant à privilégier la question des moyens de lutte et de la stratégie à celle de la finalité politique ; le tout menant in fine à une fétichisation du pouvoir étatique. Contre ce léninisme omniprésent, les conseillistes ne cesseront de répéter leur attachement à l’auto-organisation démocratique depuis la base de la société, à partir des organes de type conseil ; et donc la transformation radicale du rapport entretenu par le parti et la bureaucratie d’État à ces organes. On retrouve bien ici la thématique de la démocratie contre l’État. »

Mais par ailleurs, il critique aussi  « l’oubli du politique » de certains courants, dont on retrouve aujourd’hui les défauts parmi toute une flopée de courants (un certain anarchisme, les théories anti-pouvoir de John Holloway, les courants inspirés du postmodernisme, etc.) : « L’immédiatisme, la concentration sur les luttes sociales locales et partielles, le rejet des organisations politiques et de la représentation, le refus des questions stratégiques, l’obsession de la fétichisation étatique menant au refus du politique et finalement à la fétichisation du social, sont autant de caractéristiques spontanéistes identifiées et critiquées par la pensée conseilliste. »

L’ouvrage publie par ailleurs en annexe quelques études de Yohan Dubigeon, dont une qui vaut la peine d’être lue car elle se préoccupe d’une révolution qui dure encore aujourd’hui : celle des néo-zapatistes du Chiapas mexicain, sans doute l’exemple le plus réussi d’une pratique conseilliste qui se maintient dans le temps comme dans l’espace. Car ce courant est avant tout une expérience politique : dans ce projet d’auto-gouvernement moderne, le conseil ouvrier est à la fois moyen et fin politique.

Galaad Wilgos

Le football sera beau ou ne sera pas [8]

La très méprisante devise « le football est l’opium du peuple » est toujours prononcée par ceux Les-entraineurs-revolutionnairesqui sont assez fortunés pour se payer des vacances au ski. À ceux-là, l’argentin Bielsa répond que « les plus pauvres ont seulement le football pour se divertir, et ça me coûte de dire qu’on aurait seulement des résultats à offrir ».

L’histoire du football est marquée par des entraîneurs qui ont toujours eu l’obsession du style, de la beauté. De Gustav Sebès à Josep Guardiola, le livre Les entraîneurs révolutionnaires du football, écrit par les journalistes des Cahiers du football (Cosmidis, Kuchly et Momont), narre l’évolution du sport le plus populaire du monde à travers les parcours de sept entraîneurs. Sebès, célèbre entraîneur du Onze d’or hongrois prônait un foot socialiste discipliné et créatif. Le Milan AC d’Arrigo Sacchi popularisa la défense en zone et régna sur l’Europe quatre ans. Cruyff institutionnalisa le football total de son prédécesseur Rinus Michels. Et Pep Guardiola demeure la référence du jeu de position. Tous ces entraîneurs ont cherché à assembler des gens très différents, à créer des complémentarités, à réunir et construire un projet où l’intérêt commun prévaut sur les aspirations individuelles dans le seul but de gagner de la manière la plus belle. Tous sauf Helenio Herrera. Intrus dans la liste des sept entraîneurs nommés, Herrera est l’inventeur du catenaccio [verrou en italien]. Dans sa lignée les Mourinho, Simeone et autres entraîneurs s’enchaîneront, préférant laisser le ballon à l’adversaire afin d’exploiter ses erreurs. Ce livre rappelle à quel point la dimension humaine est fondamentale dans un sport de plus en plus contaminé par la data. Un sport où le rôle des entraîneurs, véritable leaders, parfois gourous, ont la faculté, à eux seuls, de provoquer des révolutions !

Alidovitch

Mort aux partis politiques ! [9]

1940. Simone Weil est revenue de presque tout. De ses idées révolutionnaires après avoir milité dans des syndicats et bataillé dans la colonne Durruti contre le régime franquiste dans l’Espagne de 1936 ; du marxisme, dont la confiance aveugle dans la technique l’effraie ; du pacifisme inconséquent, elle qui regrettera toute sa vie de n’avoir pas vu arriver Hitler. Cette année-là, pourtant, l’auteur des Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale montre qu’elle n’en a pour autant toujours pas terminé avec la politique et signe cette Note sur la suppression générale des partis politiques, pamphlet vindicatif contre la gangrène partisane. Ce petit ouvrage reparaît aujourd’hui, aux éditions Climats-Flammarion, accompagné d’un avant-propos de Jacques Julliard, d’une préface d’André Breton et d’une postface d’Alain, son prof de philosophie à Henri-IV.

Pourquoi lire Simone Weil en 2017 ? Parce que son discours, comme celui des plus grands, est intemporel, plus vrai que les nouvelles du journal du jour. À l’heure où le mouvement En marche ! a rebattu les cartes du jeu politique, reléguant le PS à un score minable et les Républicains (sic) à ses guéguerres intestines, la politique apparaît au peuple plus horripilante que jamais. Ce premier de la classe, qui rêve « start-up nation » et bougisme ultralibéral entre deux détricotages de nos acquis sociaux, déteste presque autant le peuple qu’il est détesté par lui. Car les classes populaires ne sont pas dupes et savent très bien ce qui se cache derrière ce morceau d’omelette sauce Juppé : le pire. Le système représentatif a finalement accouché de ce qui représente le moins le peuple français : un avorton aux dents longues dont le seul mérite est de nous rappeler Le Guépard : « Il faut que tout change pour que rien ne change. »

Rien n’a changé et les Français détestent toujours autant les hommes et partis politiques, englués dans leurs scandales financiers, petits arrangements et manipulation en tout genre. Contre eux, Simone Weil, petit bout de femme guidé par la lutte contre la force, a le bon mot et le verbe incisif. La “Vierge rouge” s’élève contre ces « organismes publiquement, officiellement constitués de manière à tuer dans les âmes le sens de la vérité et de la justice ». Ces partis ne sont rien d’autre que des « machines à fabriquer de la passion collective », c’est-à-dire des structures qui usent de propagande pour « persuader et non pas [pour] communiquer de la lumière. […] Aucun n’est audacieux dans le mensonge au point d’affirmer qu’il entreprend l’éducation du public. » Ils sont ensuite construits « de manière à exercer de la pression collective sur la pensée de chacun des membres » : au nom du rassemblement, chacun doit se soumettre à la majorité, contre la diversité des idées. Les divergences sont interdites et les membres sont contraints à penser comme un seul homme, parfois contre eux-mêmes. Enfin, ces structures, en privilégiant « leur propre croissance, et cela sans aucune limite », confondent moyens et fins. En plus de vouloir voir ses membres se multiplier à l’infini, le parti veut conquérir le pouvoir de toutes les façons et à tous les échelons, et le conserver le plus longtemps possible. Dès lors, le parti ne vise plus le bien public : « La démocratie, le pouvoir du plus grand nombre, ne sont pas des biens. […] On ne peut servir Dieu et Mammon. Si on a un critère du bien autre que le bien, on perd la notion du bien. »

La lutte pour le Bien et pour la Vérité passe nécessairement par la lutte contre ces partis, tous « totalitaires en germe et en aspiration ». Comme une maladie infectieuse, la logique partisane a contaminé les esprits de tout un chacun : « On en est arrivé à ne presque plus penser, dans aucun domaine, qu’en prenant position “pour” ou “contre” une opinion. » Contre la réduction de la politique à la logique partisane qui empêche le débat et la réflexion, contre l’avilissement de la pensée réduite au parti pris, contre « cette lèpre qui nous tue », une seule conclusion s’impose : la suppression des partis politiques.

Ludivine Bénard

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